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Plaidoyer pour les organismes communautaires 

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Plaidoyer pour les organismes communautaires
December 14, 2022

Arrivée en poste il y a cinq ans comme directrice générale, j’ai été accueillie avec toute la gentillesse et l’ouverture dont sait faire preuve l’équipe de Première Ressource, aide aux parents. Cela tombait bien, j’avais besoin de douceur dans ma vie. Pourtant, j’aurais pu être reçue autrement, moi qui ai bouleversé les façons de faire de l’organisme et demandé aux intervenantes de sortir de leur zone de confort. Ne venant pas du milieu communautaire, j’aurais pu être confrontée à une fin de non-recevoir. Après tout, elles sont, elles aussi, des professionnelles qui ont développé une expérience du terrain depuis tant d’années. J’ai eu un réel coup de cœur. Autant pour l’équipe, la mission de l’organisme et le milieu communautaire dans son ensemble.

J’admire l’expertise des organismes, les gens qui y travaillent. Des intervenantes psychosociales empathiques et bienveillantes (ce sont majoritairement des femmes) qui consacrent toute leur attention, tout leur savoir et leur talent à l’écoute des autres. Il faut avoir un grand désir d’aider son prochain et de la force de caractère pour soutenir des parents vivant des situations difficiles.

Chaque année, je constate la pertinence de nos services. Quand les enjeux demandent une compréhension plus approfondie, Première Ressource est là. Pour une petite question du quotidien ou pour un cas plus complexe, nous demeurons toujours présents. S’il y a à peine cinq ans les consultations portaient majoritairement sur le développement de l’enfant, c’est maintenant beaucoup plus de santé mentale, d’aliénation parentale, de cyberdépendance ou d’anxiété qu’il s’agit.

On aura beaucoup parlé de pandémie ces dernières années…
Et aussi des difficultés des familles, des jeunes qui ont décroché, de l’essoufflement du personnel du réseau de la santé, de la crise de la santé mentale ainsi que de la résilience des organismes communautaires qui, par leurs actions, ont démontré leur importance.

Dans le journal Le Devoir, Cécile Rousseau, pédopsychiatre, écrivait : « Les organismes communautaires ont été des acteurs clés à cause de leur capacité d’innover, de leur flexibilité et de leur lien privilégié avec les populations locales, notamment les plus vulnérables. Cela a été possible à cause de la mission de ces organisations, reconnue dans la politique gouvernementale de reconnaissance et de soutien de l’action communautaire, qui promeut la mobilisation communautaire, l’éducation populaire et la promotion de la participation citoyenne.[1] »

Claude Pinard, président-directeur général de Centraide du Grand Montréal, déclarait, quant à lui, dans le journal Les Affaires : « Si le Grand Montréal n’avait pas pu compter sur un filet social solide lors de la pandémie de COVID-19, il y a fort à parier que ses habitants auraient connu des temps beaucoup plus difficiles[2]. »

À Première Ressource, nous avons connu des augmentations fulgurantes des demandes. 42 % pour l’année 2019-2020 et 26 % en 2021-2022. Cette année, 45 % des gens qui nous consultent nous ont découverts par notre site Internet ou nos réseaux sociaux. Des 55 % de parents qui nous ont consultés à la suite de recommandations, 25 % avaient été référés par les CIUSSS, Info-Santé et le 811. C’est beaucoup. Justement, dans un article paru dans La Presse, section L’itinéraire, Valérie Roy rappelle que « les organismes sont le prolongement des services publics ». Une forme de relais pour répondre aux besoins de la population auxquels l’État ne répond pas lui-même[3].

Tout ça se traduit pour les intervenantes de Première Ressource par l’accueil de parents qui vivent des situations plus complexes. Comme Audrey Gosselin, directrice adjointe, le mentionne dans notre dernier rapport d’activité : « Tristement, nous avons constaté une augmentation significative des cas de violence intrafamiliale, conjugale et postconjugale à travers nos consultations. Nous observons un nombre inhabituel de situations de séparation, notamment auprès de familles avec de jeunes enfants. Le climat mondial, les difficultés familiales et individuelles (coût de la vie élevé, difficultés à se loger, etc.) n’ont fait qu’exacerber la détresse chez plusieurs familles québécoises déjà durement éprouvées. Beaucoup sont démunies et souffrent du manque de personnel dans plusieurs domaines : psychologique, psychosocial, médical, financier, etc.[4] »

Il faudrait aussi parler de la valeur et des besoins des organismes communautaires
Selon Cécile Rousseau, « cette contribution des organisations communautaires n’a cependant pas été reconnue à sa juste valeur; au contraire, les organismes ont été fragilisés par la pandémie, le manque d’un financement adéquat et la crise de la main-d’œuvre[5]. »

De plus, Claude Pinard souligne : « Cet élan de solidarité a toutefois laissé des traces dans le milieu; plusieurs organismes se relèvent encore de ces temps difficiles. Malheureusement, ils doivent déjà faire face à la prochaine crise : celle combinée de la hausse du coût de la vie et de la pénurie de main-d’œuvre. S’il est vrai qu’un organisme communautaire ne ferme jamais ses portes et, au contraire, trouve toujours des solutions malgré l’adversité, cela met toutefois à rude épreuve ses capacités d’adaptation. L’augmentation des charges d’exploitation, y compris des salaires, pour garder ses employés en poste, a une conséquence réelle sur la capacité des organismes[6]. »

Les organismes communautaires connaissent bien cette situation, malheureusement. On apprécie notre importance, on nous remercie, souligne notre expertise, et pourtant nous faisons encore face à cet enjeu majeur qu’est le financement pour poursuivre nos missions. Les demandes du milieu se font de plus en plus pressantes pour un meilleur financement et une confiance accrue en notre capacité de bonne gestion et de qualité de nos services.

Parlons de Première Ressource, aide aux parents
Les défis pour notre organisme s’avèrent donc grands pour l’avenir : un financement à la mission fixe alors que nos consultations gratuites et confidentielles sont en demande croissante. Une forte pression inflationniste, une rareté de main-d’œuvre, et des offres salariales plus intéressantes dans le secteur public et privé nous obligent à réviser notre politique, dans un contexte où plusieurs études démontrent que le milieu communautaire est porté par des gens expérimentés et professionnels, mais sous-payés.

Par chance, Première Ressource est bien appuyé par un conseil d’administration qui comprend les enjeux à venir et qui se dévoue pour l’organisme. Nous avons des donateurs généreux qui nous font confiance, et nous leur sommes grandement reconnaissants. Nous avons toutefois besoin de vous.

Hélène Derome

 

[1]. ROUSSEAU, Cécile. ledevoir.com/opinion/idees/757864/idees-reconnaissons-l-expertise-du-communautaire-a-sa-juste-valeur

[2]. BILODEAU, Maxime. lesaffaires.com/dossier/philanthropie-des-dirigeants-face-a-la-tempete/claude-pinard-le-pdg-qui-veut-jaser-pauvrete/637451

[3]. BÉNÉZET, Karine. plus.lapresse.ca/screens/62e7ce3d-85d8-4d2e-96d6-9625d97a598d%7C_0.html

[4]. PREMIÈRE RESSOURCE, AIDE AUX PARENTS. Rapport d’activité 2021-2022. premiereressource.com/fr/61/rapports-d-activites

[5]. ROUSSEAU, Cécile. ledevoir.com/opinion/idees/757864/idees-reconnaissons-l-expertise-du-communautaire-a-sa-juste-valeur

[6]. BILODEAU, Maxime. lesaffaires.com/dossier/philanthropie-des-dirigeants-face-a-la-tempete/claude-pinard-le-pdg-qui-veut-jaser-pauvrete/637451

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